Sacha "Gueule de braise" [Hurle-Vent] [Amélie]

Pour cette saison, ils sont deux à être venus avec moi : Sacha et Viktor. Sacha est le cousin plus âgé de Mikhaïl. Dans le clan il a la fonction de chasseur et sur les premiers jours il a énormément râlé sur le fait de venir en transhumance. Puis ça lui est passé et il a passé la plupart de son temps à jouer avec son couteau et des bouts de bois. Aucune aide à attendre de sa part.
Quant à Viktor ou plutôt « l’arpenteur des cendres » comme on l’appelle, quand il n’était pas sur mon dos à me dire comment faire ou ne pas faire les choses, il partait en vadrouille pendant des heures. Ca n’était pas tellement mieux. Cerise sur le gâteau les deux avaient du mal à se supporter et passaient leur temps à s’asticoter.

Tapie dans les buissons, je fais un signe à Sacha « Gueule de Braises »pour qu’il se décale et puisse ajuster son tir : la biche n’est qu’à une dizaine de mètres, il s’agit de ne pas faire de bruit et surtout de faire mouche au premier coup. Le jeune chasseur s’exécute, se déplaçant sans faire le moindre bruit, restant contre le vent. Je me tends, épieu en main, prête à intervenir si la flèche de Sacha rate notre proie… Il bande son arc, aligne sa flèche sur sa cible, bloque sa respiration… La flèche part, dans un sifflement et se plante directement dans la gorge de l’animal.

- Oui ! Bien joué !

Nous courrons vers la biche pour abréger ses souffrances et nous regardons l’air satisfait. Une très bonne prise pour le groupe, nous commencions à avoir besoin de nourriture plus consistante pour tenir le rythme de la marche.
J’offre un sourire au jeune Hurle-Vent. Je crois que lui aussi est radieux, derrière son horrible masque. Finalement, j’ai appris à faire abstraction de cet artefact sordide. J’en ai appris l’histoire et le cautionne bien plus à présent : Sacha était un gamin lorsqu’il s’est pris un raid de la Horde sur la tronche. Son père y est resté, et lui-même a failli brûler vif dans un bâtiment incendié par ces cinglés. Son visage a gardé les traces de cet épisode. Il a choisi de les masquer avec les dépouilles de ses ennemis jurés. Un choix un peu tordu certes, mais qui illustre parfaitement sa haine farouche de ce clan de dégénérés. Ca nous fait un point commun, le souvenir d’eux, dans la chair, avec le feu…

Nous nous attelons à attacher notre prise par les pattes à une branche pour retourner vers le campement. Mieux vaut ne pas traîner pour ne pas nous exposer aux prédateurs du coin, qu’ils soient humains ou animaux. Avec l’odeur du sang répandu, il est possible que ça rapplique vite.
Nous nous mettons en route à bonne allure.

- T’es un bon chasseur, Sacha. Je dirais même un bon guerrier. Et sache que j’ai l’œil pour ces choses-là.
- Merci Molotov. T’es pas mal non plus, dans le genre.
- Ahah. Petit con.

Je souris à nouveau en le voyant se redresser et bomber un peu le torse. Ca ne doit pas être tous les jours qu’une Division Rouge lui fait un compliment.

- Tu sais, j’ai appris, pour ton masque. T’as mon soutien. Je… j’ai aussi eu affaire à ces tarés, quand j’étais jeune. Quand j’étais très petite, même. Je ne pourrai jamais oublier. Alors si un jour on a l’occasion de les bousiller ensemble, ce sera un véritable plaisir.

Il s’est arrêté, s’est lentement retourné et m’a sondée du regard, l’air grave.

- Ce sera un honneur et une joie, Molotov.

Avec Sacha, nous nous sommes chargés de rassembler les morts et de les brûler pour éviter d’attirer les prédateurs. Lui comme moi éprouvons une jubilation indicible à mettre le jeu aux bûchers. On a mis Philippe à part, pour qu’Odyssée puisse faire une petite cérémonie pour leur ami. C’est Chad qui s’est chargé de l’oraison funèbre. Ils ont tous été anéantis et Juno a pleuré toutes les larmes de son corps.